Les aventures absolument tranquilles de Mozzarella (quoiqu'un type a dit : "tout est relatif") entrecoupées d'interludes qui ne sont pas sans contenir une inutilité obscure au profit d'un éphémère et léger divertissement.

lundi 3 août 2009

A fireworks, fusées de détresse

Lundi. Retour à la réalité, le fauteuil à roulettes du bureau endort brusquement les derniers souffles de bonheur du week-end. Tout est reparti comme en quarante, monotonie, conflits intérieurs, pensées absurdes, décompte des heures. La perspective est fabuleuse. Heureusement, il y a encore les bouquins, pour sauver Mozzarella de ce quotidien moléculaire, et pour brasser chimiquement dans son cerveau toutes ces phrases imprimées à l'encre noire, jusqu'à ce que sonne la cloche de 17h30.
Mozzarella aurait aimé continuer à marcher dans les rues de Paris, comme quelques heures plus tôt. Regarder passer les gens, les voitures, les scooters, écouter gronder les souterrains, tanguer sur les rues pavées, prendre toujours les mêmes photos de la Seine. Mais au lieu de cela, elle sentait ses jambes s'engourdir, ses yeux se fermer. Tout était si vide!
Il fallait activer l'esprit. Mais rien ne venait vraiment. Si Mozzarella avait rencontré le docteur Glückenstein, dont on connaît la profondeur d'esprit et la finesse légendaire, peut-être qu'elle aurait encore pu amorcer quelques idées. < Voyez-vous, docteur, quand je mange ma tartine de beurre et que les miettes tombent avec un petit crépitement dans mon assiette, cela m'exaspère, tout comme le chat de la voisine qui est revenu chasser le moucheron sur mon balcon l'autre soir. L'imbécile, il miaulait à minuit. De quoi rendre cinglés les poissons rouges de grand-maman. Et puis il y a l'alcoolique du 18e étage, qui balance encore son slip par la fenêtre quand il est en colère. J'aurais aimé l'aider, mais il s'enferme toujours en chantant du Aznavour à tue-tête, c'est tout bonnement impossible de lui parler. Et l'autre folle qui est venue me sonner hier soir, parce que la lumière de ma chambre était éclairée et qu'elle avait peur que j'engraisse EDF. Mais ce sont surtout ces tartines qui m'inquiètent. C'est à chaque fois la même chose, c'est lorsqu'on s'y attend le moins que la cassure fatale survient, ça vous prend au coeur, c'est comme si on avait brisé quelque chose dans l'intimité de votre petit déjeuner. Je vous assure, n'y voyez pas là un discours de névrosée. Entre nous, à la limite, je préfèrerais encore finir psychotique. Là au moins, je n'aurais pas conscience de mon cas. C'est tellement agaçant, docteur, d'être plantée au boulot durant 8 heures avec un ordinateur pour discuter de la pluie et du beau temps. Je ne sais pas vous, mais moi j'en ai des palpitations. Tenez, ça fait un peu la même impression que les carottes trop cuites : ca éveille une colère maladive, parce qu'on sait qu'on passe à côté d'un truc incroyable. Sauf si bien sûr, on croit à la destinée. Mais enfin, ça c'est un autre problème. Je songeais à écrire un petit traité sur les pâtes fraîches. Qu'en pensez-vous, docteur? En ce qui concerne la carbonara, quoi de plus fascinant qu'une extrapolation dans le domaine du narcissime? Bien sûr, vous vous dites que je ne suis pas lucide. Mais ne pensez-vous pas que c'est par l'absurdité poussée à son paroxysme que tout s'éclaire? N'est-ce pas dans le noir complet qu'on voit de grands flashes de lumières? Ah, je vous entends déjà répondre : des flashes, jamais rien que des flashes, aucun éclairage continu... oui, c'est vrai, mais c'est toujours ça. L'humain ne peut pas être clairvoyant en permanence, sa courbe de lucidité est fonction de son état d'esprit. Comment, vous ignoriez ça, docteur? On vous aurait menti sur le divin? Ou sur le divan? Ne vous en faites pas, il paraît qu'on en apprend à tous les âges. Vous savez, quand on a découvert que la terre était ronde, il devait y en avoir pas mal qui frôlaient la quarantaine. Vous me direz, quarante ans, c'est peu, mais pour l'époque... ils ne devaient pas en mener large. Bon, ça suffit. Je m'en retourne à mes moutons. N'oubliez pas d'épousseter ma chaise quand je serai partie, il paraît que la thérapie extrait de notre cerveau des émotions bien ancestrales qui soulèvent des nuages de poussière. Dommage, je suis allergique. Au revoir, docteur. >


1 commentaire:

Ivory a dit…

"Tout est reparti comme en quarante, monotonie, conflits intérieurs, pensées absurdes, décompte des heures."

Courage! plus que deux jours ;-)